Entre l’appel à déviriliser le « barbecue » (S. Rousseau) et le plaidoyer en faveur d’une « bonne viande » (F. Roussel) en passant par les polémiques sur l’introduction de menus végétariens dans les villes EELV, ces derniers mois ont été marqués par une politisation croissante des enjeux liés à l’alimentation dans un contexte où les milieux identitaires érigent de plus en plus la viande en symbole de la virilité et de résistance à un certain « politiquement correct » alimentaire. Alors que ce débat prend un tour judiciaire avec l’ouverture d’un procès entre la Fédération nationale des chasseurs et Sandrine Rousseau, l’Ifop et Darwin Nutrition publient la première enquête de fond sur les rapports au genre et à la politique des amateurs de viande. Réalisée auprès d’un échantillon de taille conséquente (2 000 hommes âgés de 18 ans et plus), cette enquête met non seulement en exergue le fait que la consommation de viande est devenue un marqueur politique fort mais aussi qu’un régime alimentaire hyper-carné va souvent de pair avec une vision ultra-conservatrice de la place de la femme dans la société.
Téléchargez le rapport1. Si les propos de Sandrine Rousseau sur la virilité du barbecue avaient fait l'objet de vives réactions, l'opinion des hommes s'avère beaucoup plus nuancée : 62% partagent le point de vue de la députée pour qui il faut déviriliser la consommation de viande cuite au barbecue 2. Ce soutien de principe à une évolution des mentalités ne les empêche pas pour autant de reconnaître que cet ustensile fait, pour l’heure, l’objet d’un quasi-monopole masculin : 78% des hommes s’occupent plus souvent du barbecue que leur conjoint(e), dont 41% de façon exclusive 3. Sobriquet moqueur affublé par les « mascus » aux hommes avalant des protéines végétales, le terme de « soy boy » est massivement désapprouvé par les Français (72%), conscients qu’il vise à dénigrer les hommes osant transgressant les normes alimentaires assignées à leur genre 4. Les Français sont encore très imprégnés par les clichés associant virilité et viande, signe qu'avec l’adage « fort comme un bœuf », ils ont intériorisé la thèse selon laquelle l’énergie vitale de l’animal confère l’énergie nécessaire au développement de leur masse musculaire 5. Loin d'être difficile à assumer socialement, l’étiquette de « viandard » est aujourd'hui affichée par une majorité de Français (56%). Mais surtout, les hommes revendiquant le plus fièrement ce statut de « très viandard » (18%) présentent un profil très droitier. 6. A l’inverse, les « flexitariens » auto-proclamés – définis comme les hommes essayant « de manger de la viande le moins possible » – s’avèrent nettement plus représentés parmi les électeurs Mélenchon (18%) ou Jadot (27%) 7. Les gros consommateurs de viande de bœuf s’avèrent nettement plus imprégnés de stéréotypes sexistes que les hommes en ayant une consommation modérée. Cela transparaît dans une conception beaucoup plus traditionnaliste de la famille et davantage d'adhésion à la culture du viol. 8. Dans le contexte d’ouverture du procès mené envers Sandrine Rousseau pour des propos liant arme de chasse et féminicides, il est aussi intéressant de noter que les chasseurs sont aussi très imprégnés par les stéréotypes de genre et une tolérance plus forte au harcèlement sexiste
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