Le 20 mars 2020, le président de la République a annoncé que le système de santé ne pourrait rester en l’état et promis « un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble des carrières ». Malgré un début de réalisation, fin 2021, nombre de lits hospitaliers sont fermés, faute de personnels gagnés par la lassitude et la démoralisation, et les « déserts médicaux » se multiplient. A l’évidence, il est nécessaire de sortir le système de santé d’une logique entrepreneuriale et financière.
La protection de la santé, une responsabilité de l’Etat
La santé est une des premières préoccupations des Français et s’il existe une indéniable responsabilité individuelle, ils se tournent spontanément et sans hésitation vers l’Etat dès que se profilent un scandale, un problème ou une incertitude sanitaires. La pandémie de Covid-19 en est l’exemple le plus récent.
Juridiquement, ils ont raison. Le préambule de la Constitution française de 1946, toujours applicable, « proclame que la Nation garantit à tous... la protection de la santé... ». La même année, un des principes de la Constitution de l’Organisation Mondiale de la Santé stipule que « les gouvernements ont la responsabilité de la santé de leurs peuples; ils ne peuvent y faire face qu’en prenant les mesures sanitaires et sociales appropriées ».
L’Etat a donc juridiquement des responsabilités éminentes dans le domaine de la protection de la santé
Un ministère de la santé et de l’assurance maladie
La protection de la santé souffre de sérieux handicaps historiques et structurels qui nuisent à sa prise en considération aux niveaux parlementaire, gouvernemental et administratif. Le premier ministère chargé de la santé ne date que de 1920, sans en porter le nom qui n’apparaît qu’avec Simone Veil en 1974. Depuis, il s’agit soit d’un simple Secrétariat d’Etat aux pouvoirs limités, soit d’un énorme Ministère des Affaires Sociales qui gère surtout de nombreuses « prestations en espèces » (retraites, allocations familiales, chômage et bientôt dépendance). La santé n’en est alors qu’une composante mais c’est un domaine de « prestations en nature » (professionnelles), donc fondamentalement différent, ce qui est source d’incompréhension, de conflits et de méfiance.
La protection de la santé est donc soit reléguée dans un Secrétariat d’Etat, soit diluée dans un Ministère des Affaires Sociales.
Cette situation remonte au Conseil National de la Résistance qui établit le 15 mars 1944 «un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail». D’où le principe d’une Sécurité Sociale dont l’Assurance Maladie n’est qu’une « branche ». Il peut sembler difficile de remettre en question un tel héritage historique, symbolique, prestigieux et généreux, mais nombre de principes initiaux ne sont déjà plus appliqués comme les élections des conseils d’administration et, aujourd’hui, la majorité du financement de l’Assurance Maladie ne relève plus des cotisations mais de l’impôt.
Pour assurer la cohérence de l’action et exercer la complétude du périmètre de ses responsabilités, notamment l’organisation des soins ou la réponse aux crises sanitaires, il serait logique et fonctionnel d’instituer un ministère de la santé disposant de la totalité des crédits du budget de l’Etat consacrés à la santé et de la tutelle sur le budget de l’Assurance maladie. Tenté une seule fois, l’expérience d’un ministère de la Santé Publique et de l’Assurance-maladie ne dura guère, du 18 mai au 7 novembre 1995. L’exercice fut sans doute jugé trop innovant ou donnant une latitude trop grande au monde médical.
Une gestion unifiée de la santé permettrait :