Certes, comme l’écrit une éditorialiste, l’Allemagne a bénéficié d’une certaine chance. Elle a été frappée par le Codiv par l’intermédiaire de quelques jeunes skieurs revenus du Tyrol autrichien alors que la France et l’Italie ont subi les inconséquences de centaines d’évangélistes sans scrupules réunis à Mulhouse. Il n’empêche. L’Allemagne était préparée à affronter ce fléau et a su réagir très vite, ne perdant pas de temps en palabres et autres controverses. Ce qui n'était pas à l'évidence notre cas.
En multipliant très tôt les politiques de dépistages, notamment en pratiquant des centaines de milliers de tests sur les populations à risques et les personnes âgées, en décidant rapidement d'une politique d’isolation, en distribuant masques, blouses et gants, en s'assurant que les hôpitaux ne manquaient pas de respirateurs, le gouvernement allemand a pris des décisions qui portent aujourd’hui leurs fruits puisque l’Allemagne est le pays où le pourcentage de décès rapporté au taux de létalité, c’est à dire au nombre de personnes infectées par le Covid, est le moins important d’ Europe.
Mais on aurait tort de se limiter à cette seule analyse : avec un nombre de lits de réanimation de près de 25 000, malgré des suppressions ces dernières années, contre un peu plus de 5 000 en France, l’Allemagne, a pu faire face à des situations d’urgence - en accueillant même des patients français - que peu de pays ont pu accomplir. Avec un budget de recherche en forte expansion et une politique sanitaire au plus près des Lands, et donc une véritable politique de décentralisation qui prend en compte les besoins au plus près des régions, elle a mis en place un système médical et économique, qui est parmi les plus performants et les plus efficaces. L’actualité le montre à loisir. Que nous a-r-il donc manqué ? pas grand chose peut-être...mais l'essentiel sans doute.. A savoir la modestie et une volonté politique de s'impliquer suffisamment tôt pour prévenir une crise sanitaire. Il faudra en tirer les leçons sans se cacher sous des prétextes.
On notera aussi, et ce n'est pas le moins important, que la gestion politique de la crise par le gouvernement Merkel est à l’opposée de celle prônée par le gouvernement d'Edouard Philippe.
« Nous ne sommes pas en guerre », a expliqué dans un de ses rares discours le président allemand Frank-Walter Steinmeier, prenant ainsi le contre pied du Chef de l'Etat français, Emmanuel Macron. « Les nations ne s’opposent pas à d’autres nations, les soldats à d’autres soldats. C’est un test de notre humanité », a ajouté Frank-Walter Steinmeier. Cette crise « fait ressortir le meilleur et le pire des gens. Montrons aux autres ce qu’il y a de meilleur en nous », a-t-il exhorté ses concitoyens. L’Allemagne ne pourra pas « sortir de la crise forte et saine » que si ses voisins « ne deviennent pas eux aussi forts et sains ». Il faudra retenir cette leçon...
Fortes paroles qui donnent aussi au gouvernement d’Angela Merkel, une responsabilité européenne majeure dans la gestion de l’après crise sanitaire. D’autant que l’Allemagne prendra dès le 1er Juillet la présidence de l’Union européenne. Et qu’elle ne pourra pas se dérober à ses devoirs à l’heure où l’Europe a rarement paru aussi divisée et que le spectre du Brexit rode toujours.