Interrelations entre santé et santé orale
Rien ne vaut quelques chiffres pour prendre conscience d'un problème. En particulier lorsqu'il s'agit de santé publique. Parmi les résidents en Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), 75% ont un état dentaire délabré. Rien d'étonnant puisque 81% de ces personnes dépendantes n’ont pas consulté depuis cinq ans. Conséquences : un résident sur cinq en Ehpad a une alimentation molle et un résident sur deux a un problème parodontal alors même que pour 80% d’entre eux la prise en charge au cabinet dentaire est possible.
D’autres chiffres révèlent des problèmes similaires chez les plus jeunes ou en situation de handicap. La moitié des dix million de personnes en situation de handicap a un état bucco-dentaire préoccupant. Quant aux ados en établissement médico-social, 37% d'entre eux ont des problèmes de caries. Soit plus du tiers… Pire! Les 6, 12 ans ont quatre fois plus de risques d’avoir des problèmes bucco-dentaire en situation de handicap. Pour toutes ces personnes en situation de dépendance les conséquences sur la santé orale sont catastrophiques car ces désordres engendrent, douleurs, complications pulmonaires, troubles de la digestion, perte du goût, aggravation des pathologies chronique en particulier cardio-vasculaires.
Améliorer la qualité de vie, au quotidien, des personnes dépendantes n'est pourtant pas impossible. A condition de disposer d'une solution simple et adaptée à la fois aux résidents, aux Ehpads et au chirurgien-dentiste traitant. Une solution que les nouvelles technologies ont permis d'imaginer. L'Union française pour la santé bucco-dentaire (Ufsbd) a ainsi fait le choix de de la télémédecine -ou télé-expertise- en s’associant avec la société Dental Monitoring. L'objectif? Mettre à disposition des ehpads un programme de prévention.
Actuellement en phase test, Oralien permettra à l'Ufsbd de proposer, à partir de janvier 2018, un plan d’action santé orale dans le projet de l’établissement. L'intérêt? Mettre en place des actions de sensibilisation auprès des résidents et de leurs familles, pour détecter le plus tôt possible si une prise en charge au cabinet dentaire s’impose. Une avancée considérable puisqu'ainsi le lien entre le patient résident de l’Ehpad et le chirurgien-dentiste référent ne sera pas rompu.
La principale vertu du programme Oralien, c’est sa simplicité. Ce programme s’adresse à l’ensemble du personnel de l’Ehpad des cadres de santé aux aides-soignants en passant par les auxiliaires de vie et les infirmières. Photographier, scanner… est à la portée de tout le monde. En revanche approcher un patient dans les meilleures conditions pour lui faire un scan de la mâchoire demande une approche particulière. Aussi dans le cadre du développement d'Oralien est-il prévu une journée de formation sur la santé bucco -dntaire et l’utilisation de l’outil. L’accent est mis sur le mode d’approche du geste buccodentaire que seule l’expérience du Chirurgien-dentiste peut avoir. Il est en effet utile de rappeler au personnel soignant des Ehpad que la bouche est une zone extrêmement sensible et que certaines techniques d’approche du patient s’imposent.
Car facilité d'utilisation ne signifie pas pour autant simplicité. Derrière l’apparence d’un téléphone qui va scanner la mâchoire du patient résident se cache ainsi une logistique data à distance qui va gérer analyser digérer les résultats des scanners analysés pour au final donner une recommandation, formulée par un chirurgien-dentiste sur ce qu’il convient de faire pour chaque patient. Toutes ces données patient sont bien entendu sécurisées et conformes aux normes de protections des données patients recommandées par les pouvoirs publics.
La formation explorera en détail le fonctionnement de l’appareil. Rien de sorcier pour autant. Tout est fait pour faciliter la tâche de l’utilisateur avec un guide embarqué sur l’appareil qui l’oriente sur la prise de vue, l’angle et le cadrage utile. Viennent ensuite quelques questions sur le patient, un commentaire si besoin et le tout est envoyé dans la base de donnée Oralien pour analyse selon un protocole sécurisé et validé par l’Ufsbd. Plus tard, suivront les rendez-vous d’évaluation entre les cadres de l’établissement et un chirurgien-dentiste de l’Ufsbd qui comprendront l’analyse des données recueillies, l’analyse de l’évolution des pratiques de l’établissement et les conseils pour optimiser la prise en charge des résidents au quotidien.
Tout cela a un coût qu’il faut toujours, en matière de santé, mettre en perspective avec les bénéfices de confort de vie des patients, et dans la balance bénéfice/coût, nul doute qu’Oralien apporte une solution adaptée à une problématique santé qui est loin d’être secondaire. Car tout ceci n’est que le premier étage d’une fusée qui en comporte deux. Au-delà de l’Ehpad, c’est bien entendu la personne âgée à domicile ou en situation de handicap qu’il conviendra d’aller voir. Et là se posera la question de l'intermédiaire. Faudra-t-il impliquer un professionnel de santé? Et le quel : un infirmier, un kiné, un pharmacien, le médecin-traitant? Une aide-soignante? Ou tout simplement un aidant, qui dans bien des cas est, comme le patient, un expert de la maladie ou de la vieillesse à laquelle il est confronté? La question reste entière… et le chantier immense.