La Commission européenne a engagé 6 accords de préachat [1] pour mettre près de 1,5 milliard de doses de vaccins anti-Covid-19 à la disposition des États membres, dont 200 millions pour la France. Suivant les résultats des essais cliniques de phase 3, l'Agence européenne des médicaments (EMA) pourrait délivrer les premières autorisations de mise sur le marché (AMM) avant la fin de l'année 2020, ce qui permettrait d'initier la campagne nationale de vaccination dès le mois de janvier 2021. L'objectif premier de cette campagne étant de réduire la morbidité et la mortalité attribuables à la Covid-19, un ordre prioritaire a été établi par la Haute autorité de santé (HAS) classant en phase initiale les personnes ayant le plus de risques de développer des formes graves de la maladie [2].
La proximité inattendue de cette perspective réveille une hésitation vaccinale dont la France aurait le regrettable privilège d'être le porte-drapeau. D'après l'enquête CoviPrev de Santé publique France, le taux de personnes acceptant de se faire vacciner est passé de 64% en juillet à 53% en novembre. En plus du climat général d'inquiétude qui s'accroît dans la population depuis le début de la pandémie, cette évolution reflète une perte de confiance des citoyens vis-à-vis de l'autorité sanitaire et une défiance irraisonnée envers des vaccins de conception nouvelle développés en un temps record mais dans le respect des règles de sécurité sanitaire.
La prudence exprimée par certains médecins soucieux de connaître les résultats définitifs des essais de phase 3, puis alléguant le manque de recul pour se forger une opinion, amplifiée et parfois dévoyée par les médias, conforte un sentiment de méfiance dans le grand public.
Â? que la Covid-19, en 10 mois, a tué plus de 1 600 000 personnes dans le monde, dont 57000 en France, provoqué une récession économique mondiale et aggravé les situations d'extrême pauvreté;
Â? que, malgré l'application la plus stricte des mesures de prévention individuelles et collectives, aucun pays n'a encore réussi à éliminer le SARS-CoV-2 ;
Â? que, même dans les pays les plus affectés par la pandémie, les niveaux d'immunité collective sont trop faibles pour escompter un ralentissement spontané de la propagation du virus ;
Â? que seule, l'initiation précoce d'une campagne internationale de vaccination de grande ampleur permettra de contrôler cette pandémie au cours de l'année 2021 ;
Â? que les performances des premiers vaccins disponibles utilisant la technologie nouvelle de l'ARN messager, produits par Pfizer-BioNTech et Moderna, suscitent de grands espoirs avec un rapport bénéfices/risques très favorable, quand bien même des études complémentaires restent nécessaires, notamment pour préciser la durée de la protection et l'impact sur la transmission ;
Â? que la délivrance d'une AMM par l'EMA, attendue pour le 29 décembre, permettra de lever toute réticence au sein du corps médical français et de motiver l'ensemble du personnel soignant pour contribuer au succès du programme national de vaccination ;
Â?• que la généralisation d'emploi du carnet de vaccination électronique permettra d'améliorer l'efficacité et la sécurité de cette immense œuvre de santé publique [3].
[1] Communiqué de l'Académie nationale de médecine « Vaccination contre Covid-19 : pour que l'espoir prenne forme !», 16 novembre 2020
[2] Stratégie de vaccination contre le Sars-Cov-2 Recommandations préliminaires sur la stratégie de priorisation des populations à vacciner. 30 novembre 2020
[3] Communiqué de l'Académie nationale de médecine « Pour réussir la campagne nationale de vaccination contre la Covid-19, n'oublions pas le carnet électronique de vaccination», 3 décembre 2020