Santé Publique France lance le 23 octobre la campagne « OK, pas OK ».

Consentement chez les adolescents : savoir l'exprimer, savoir l'entendre

- Théragora le 24 octobre 2018 / FL N° 14 - Page 0

Le consentement est une question prioritaire pour les jeunes qui font leur entrée dans la vie sexuelle et affective. Elle est régulièrement évoquée dans les séances d’éducation à la sexualité en milieu scolaire (7 animations sur 10). Les données du Baromètre santé 2016 révèlent que 10,7% des femmes ont cédé aux attentes de leur partenaire lors de leur premier rapport contre 6,9% des hommes. Dans le cadre de son programme de Santé sexuelle, Santé publique France s’est fixé comme objectif de favoriser une entrée et une installation positives des jeunes dans la sexualité. Parce que la question du consentement se pose avec force, l’Agence lance le 23 octobre la campagne « OK, pas OK ».

 

 

 

La Santé sexuelle, un enjeu de santé publique

Le programme de Santé sexuelle de Santé publique France et ses objectifs
Engagé de longue date, Santé publique France est un acteur clé dans le champ de la santé sexuelle, à travers la surveillance épidémiologique et comportementale, les dispositifs de prévention et le développement d’actions innovantes. L’approche de l’agence en matière de santé sexuelle est à la fois positive et globale. Elle s’adresse à tous les publics (jeunes, adultes, hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes...) et aborde de nombreux sujets en veillant à consulter régulièrement les acteurs de terrain et les associations.

Le programme « santé sexuelle » est structuré autour des trois axes suivants :
# la promotion de la santé sexuelle, pour toutes et tous, à tout âge, dans une approche globale et positive,
#ï?· l’amélioration de la connaissance et de l’appropriation de la prévention diversifiée pour lutter contre le VIH et les autres IST,
#ï?· l’amélioration de la santé reproductive.

Les actions menées ont pour but d’améliorer le niveau de connaissances des individus et également de faire évoluer les attitudes, croyances et comportements pour permettre à chacun de prendre des décisions éclairées quant à sa santé sexuelle.

Le programme Santé sexuelle de Santé publique France s’inscrit dans le cadre de la récente « Stratégie nationale de santé sexuelle – Agenda 2017-2030 » (SNSS) qui répond à une démarche globale d’amélioration de la santé sexuelle et reproductive. Son objectif général est d’assurer « un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social lié à la sexualité, de la naissance jusqu’à la vieillesse pour l’ensemble de la population ».

Favoriser une entrée et une installation positives des jeunes dans la sexualité
En matière de santé sexuelle, l’adolescence constitue un moment clé pour promouvoir des comportements bénéfiques qui perdureront dans le temps. En effet, c’est l’âge où les changements entrainés par la puberté, la découverte et l’entrée dans la sexualité vont créer un nouveau rapport au corps, à l’image de soi mais également à l’autre. Les enjeux pour la prévention y sont d’autant plus grands : au-delà de la protection contre les risques immédiats liés à l’activité sexuelle (grossesses non prévues, infections sexuellement transmissibles, ...), c’est à cet âge, et avant les premiers rapports sexuels, que les bons réflexes peuvent se mettre en place.
L’entrée dans la vie sexuelle est une étape décisive qui génère beaucoup d’appréhension et de questions chez les jeunes. Après les amis, Internet constitue souvent pour eux le premier recours en matière d’information.

 

Onsexprime.fr, le site qui répond aux questions des ados

En direction des adolescents, Santé publique France a une approche spécifique d’éducation à la sexualité, notamment avec le site Onsexprime.
Né en 2009, le site Onsexprime.fr traite de tous les aspects liés à la sexualité de manière ludique et pédagogique. Il aborde la santé sexuelle dans sa globalité intégrant ainsi aussi bien l’aspect du plaisir, que les aspects physiques, émotionnels, mentaux ou encore sociaux. La vocation du site est d’aider les adolescents à faire une entrée positive dans la sexualité en les informant et en les incitant à prendre du recul et à se poser les bonnes questions. Pas de fausse pudeur, pas de ton culpabilisant, toutes les questions sont considérées comme légitimes et méritant réponse.

Le site regroupe des informations pratiques, des messages de prévention, des conseils, des témoignages, des paroles de professionnels de santé... L’information est délivrée de manière ludique et attractive (vidéos, modules interactifs, web série...) tout en étant élaborée en collaboration avec des groupes de travail et d’experts composés de professionnels de santé, de membres d’associations ressources sur le sujet (Planning familial -MFPF, Ligne Azur, Fil Santé Jeunes) et d’experts de l’éducation à la sexualité (Crips, Ireps, enseignants, etc.).

En 2018, Santé publique France a mis à jour sur le site Onsexprime.fr sa rubrique « Sexe & Droits » qui permet aux jeunes de découvrir leurs droits en matière de sexualité et comment agir en cas d’abus. De nombreux sujets y sont abordés : les droits sexuels, la majorité sexuelle, les abus sexuels et aujourd’hui le consentement.
 

 

Comportement sexuel en France : quels changements ?

L’enquête Baromètre santé 2016, réalisée auprès de 15 216 personnes de 15 à 75 ans résidant en France métropolitaine, permet de faire un point sur l’évolution des comportements sexuels depuis l’enquête « Contexte de la sexualité en France » menée en 2006. Il ressort de son analyse que la sexualité en 2016 reste profondément marquée par les rapports de genre et qu’un décalage notable existe entre certains discours et la réalité sociale.

 

L’âge du premier rapport, stable depuis 10 ans

L’âge médian d’entrée dans la sexualité s’est stabilisé ces dix dernières années. Il est de 17,6 ans pour les filles et 17,0 ans pour les garçons, sans différence notable selon le milieu social. Si cet événement est vécu approximativement au même âge, il reste encore très marqué par les questions de genre. Les jeunes filles s’initient plus souvent avec un partenaire plus âgé d’au moins deux ans (la moitié d’entre elles contre un cinquième des hommes) et qui a déjà eu des rapports sexuels.
Les jeunes hommes sont plus nombreux à débuter leur vie sexuelle avant 15 ans pour 16,5% des garçons vs 6,9% des filles. Les initiations dites tardives, à partir de 19 ans, concernent davantage les femmes (33,2%) que les hommes (23,1%). Ces deux indicateurs n’ont pas évolué dans les quatre dernières décennies.

Un premier rapport majoritairement souhaité, mais pas toujours
La grande majorité des moins de 30 ans déclare avoir souhaité ce premier rapport « à ce moment-là » : 87,6% pour les femmes contre 92,8% pour les hommes. Une femme sur 10 rapporte cependant avoir cédé aux attentes de son partenaire (contre 6,9% des hommes). 1,7% des femmes déclarent avoir été forcées à avoir ce rapport contre 0,3% pour les hommes.

L’amour ou la tendresse est à l’origine de ce premier rapport pour plus d’une femme sur 2, contre 1 homme sur 4. Le désir sexuel est le moteur pour 47 % des hommes contre 25,8% des femmes. Ces raisons sont les mêmes qu’il y a 10 ans : le registre affectif prédomine chez les femmes, le désir chez les hommes.

Des violences sexuelles de plus en plus déclarées par les femmes
Les données du Baromètre santé 2016 montrent que 18,9% des femmes et 5,4% des hommes de 18- 69 ans déclarent avoir déjà été confrontés à des tentatives ou à des rapports forcés. L’ampleur de ce phénomène est plus marquée en 2016 qu’en 2006 pour les femmes (18,9% contre 15,9%), tandis que les déclarations des hommes restent au même niveau qu’il y a 10 ans (5,4% contre 4,5%, différence non significative).

La première expérience de ces violences survient majoritairement avant 18 ans, dans 47,4% des cas pour les femmes et 60,2% pour les hommes. Chez les 15-17 ans, 8% des jeunes femmes ont déjà été confrontées à des rapports forcés ou à des tentatives de rapport forcés contre 1% des jeunes hommes. Si la parole se libère autour des violences sexuelles, la prévention est indispensable car ces violences subies ont un impact important sur la santé.

 

Une campagne pour apprendre à dire ce que l’on veut et écouter ce qu’on nous dit

La question du consentement sexuel fait partie des problématiques fréquemment abordées lors des séances d’éducation à la sexualité en milieu scolaire. Dans près de 7 animations sur 10, les jeunes évoquent le sujet1. Pour les professionnels chargés de réaliser des séances d’éducation à la sexualité en milieu scolaire, le consentement constitue une clé de voûte afin de permettre aux adolescents de construire leur rapport à l’autre et à soi. Or le consentement ne se résume pas à un simple « oui » ou « non » car d’autres paramètres, entrent en jeu : le désir, la découverte, l’hésitation, la négociation, le poids du groupe. Aucun mode d’emploi n’existe, les jeunes doivent apprendre à écouter ce qu’ils ressentent, à s’interroger sur leur désir et à poser et accepter leurs limites.
 

 

 

3 Questions à Nathalie Bajos, sociologue, directrice de recherche à l'Inserm

Comment définiriez-vous le consentement ?
La notion de consentement est éminemment complexe. Elle renvoie à de multiples acceptations juridique, philosophique, sociologique, psychologique. Elle est d’autant plus complexe que l’on peut consentir sans vouloir. En schématisant, on pourrait dire que consentir c’est s’engager dans une relation ou des pratiques sexuelles lorsqu’on en a véritablement envie soi-même. En réalité, la relation sexuelle fait intervenir des personnes entre lesquelles existe un rapport de pouvoir et elle survient dans un contexte où les normes sociales de la sexualité sont profondément genrées.
Ainsi, on peut considérer qu’il existe trois niveaux dans le consentement. Le premier renvoie à la légitimité sociale d’exprimer ce que l’on veut et ce que l’on ne veut pas. Le deuxième dans le fait que l’expression même de ses attentes est marquée par des normes inégalitaires. Le troisième consiste à exprimer ce que l’on a envie de faire et que l’autre puisse l’entendre et en tenir compte.

Les comportements sexuels des jeunes évoluent peu, comment l’expliquez-vous ?
Dans cette enquête scientifique, plusieurs résultats me semblent intéressants. L’âge médian de l’entrée dans la sexualité est d’une grande stabilité au fil du temps et les personnes qui s’initient de façon dite précoce (- de 15 ans) aussi. Ces résultats contredisent l’idée souvent véhiculée qu’avec le porno les jeunes commencent leur sexualité plus tôt, qu’ils font n’importe quoi, qu’ils ne se protègent pas... Ce décalage entre la réalité et certains discours médiatiques illustre ce que les sociologues appellent la panique morale des adultes par rapport à la sexualité des jeunes. Cette notion mise en évidence par le sociologue Michel Bozon est la résultante de deux phénomènes : la diversification des sources normatives sur la sexualité (médias, internet, pairs, famille, église, école...) et l’allongement de la période de jeunesse sexuelle qui ne permettent plus aux adultes de contrôler comme avant la sexualité des jeunes.

La sexualité reste marquée par les rapports de genre, est-ce une fatalité ? Que faire pour changer les mentalités ?
On constate dans l’enquête des évolutions à tous les âges vers un moindre écart entre les hommes et les femmes, mais des différences demeurent comme, par exemple, pour les motifs qui ont présidé au premier rapport sexuel où l’on voit que les femmes évoquent les sentiments et les hommes le désir. Même si le premier partenaire des jeunes femmes n’est plus leur futur mari, il en conserve tous les attributs sociaux et symboliques : il est souvent plus âgé, plus expérimenté. Les changements que l’on constate aujourd’hui sont le reflet de l’évolution du statut social des femmes dans la société. Les choses évoluent lentement. Autre résultat notable : les violences sont plus déclarées en 2016 qu’en 2006 en particulier par les femmes alors que le nombre d’épisodes de violence n’a pas particulièrement augmenté. Les campagnes de sensibilisation ont atteint leur but et ont, avant même les mouvements #metoo, contribué à libérer la parole des femmes.

Toutefois, la sexualité des femmes continue à être pensée sur le registre de l’affectif et de la conjugalité alors que celle des hommes renvoie surtout au registre des besoins sexuels à assouvir. Lorsque le sexe ne sera plus une variable de distinction dans les positions sociales des individus, il y aura des effets clairs sur la sexualité. L’éducation à la sexualité est aussi un enjeu majeur. Les travaux scientifiques montrent que très tôt les enfants ont des représentations genrées de la sexualité. Il est essentiel d’intervenir dès le plus jeune âge pour ne pas laisser ces stéréotypes de genre s’installer. Très tôt, il faut leur parler du respect de soi, du respect de leur corps, du respect des autres et de la diversité des sexualités.


 
2 questions à Lucile Bluzat,
Chargée d’expertise en marketing social, Unité santé sexuelle, Santé publique France

Pourquoi avez-vous décidé de lancer une campagne sur cette thématique ?
La question du consentement a déjà été abordée dans nos campagnes mais de manière diffuse. Depuis quelques années notre approche en santé sexuelle a évolué. Si les risques (grossesses non prévues, IST, VIH) sont toujours abordés, nous élargissons nos interventions à d’autres sujets comme les violences sexuelles, les relations affectives et à tous les déterminants de la santé sexuelle comme les questions d’estime de soi, le fait de se sentir bien dans sa sexualité. Le lancement de la Stratégie nationale de santé sexuelle et l’égalité entre les femmes et les hommes déclarée grande cause du quinquennat participent à donner à la promotion de la santé sexuelle cette nouvelle dimension. L’émergence des mouvements metoo, l’année dernière, ont mis en avant comme jamais les problématiques liées au consentement qui étaient jusque-là un concept assez flou, difficile à aborder et qui restaient dans les médias très cantonnées à des récits de faits divers, d’affaires judiciaires et de cas spectaculaires. Notre public adolescent a bien sûr été sensibilisé par les médias à ce sujet. Le moment était donc parfait pour l’aborder de nouveau sur Onsexprime. Au printemps, nous avons travaillé avec le ministère de la Justice pour mettre à jour les informations de la rubrique « Droits & Santé » du site : Quel est l’âge à partir duquel on a le droit de faire l’amour ? Quelles sont les questions liées à la « majorité » sexuelle ? Qu’est-ce qu’un abus ? Qu’est-ce qu’un viol ? Il nous a alors paru essentiel de mener un second volet plus général sur le consentement qui est une notion plus large.

Pourquoi est-il important de parler sexualité aux jeunes ?
La littérature internationale montre les bénéfices de l’éducation à la sexualité. Elle permet aux adolescents d’exercer leur sens critique vis-à-vis des normes en matière de sexualité qui leur sont assénées (performance, uniformité des corps, plaisir...), de comprendre les enjeux liés à la sexualité et d’avoir les réflexes et le discernement propres à l’adoption de comportements favorables à leur santé sexuelle.
Notre approche à travers le site Onsexprime est de donner aux adolescents l’ensemble des informations et connaissances leur permettant de bien vivre leur sexualité.

 

Lire le Baromètre Santé 2016 / Genre et Sexualité
AUTEURES Nathalie BajosInserm U1018 – CESP
Delphine Rahib Nathalie Lydié Santé publique France

 

 

Onsexprime, le site de Santé publique France dédié aux ados

Le site Onsexprime.fr traite de tous les aspects liés à la sexualité de manière ludique et pédagogique. Il aborde la santé sexuelle dans sa globalité intégrant ainsi aussi bien l’aspect du plaisir, que les aspects physiques, émotionnels, mentaux ou encore sociaux. La vocation du site est d’aider les adolescents à avoir une entrée positive dans la sexualité en les informant et en les incitant à prendre du recul et à se poser les bonnes questions.

L’information est délivrée de manière ludique et attractive (vidéos, modules interactifs, web série...) tout en étant élaborée en collaboration avec des groupes de travail et d’experts. 
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